La chambre Françoise Chandernagor De l'académie Goncourt

Publié le 13 Mai 2010

Imaginez un royaume qui se réduit à un palais, qui se réduit à une tour, puis à un appartement, à quelques pièces et enfin à une chambre et à un lit.

Imaginez le temps, qui passe, qui coule, qui goutte et qui s’ensable. Ce temps qui n’en fini pas de passer.

Imaginez le jour, de toute façon vous ne pouvez que l’imaginez vous n’avez que la pénombre, dans cette chambre hors du temps.

Numériser0006 (2)-copie-1Imaginez la vie, imaginez l’amour, pas le sentiment amoureux, non, juste l’amour maternel. Imaginez-le car lui non plus n’existe plus.

Imaginez ! Fermez les yeux et imaginez. L’espace est restreint, il fait sombre, vous n’avez pas la moindre idée de l’heure, du temps qui passe. Pourtant de temps en temps une porte s’ouvre, une bougie enrobe d’un pauvre halot votre espace, vous dépose de quoi vous nourrir. La porte s’ouvre de nouveau que vous ayez ou non mangé le plateau part avec la lumière. Où penseriez vous être ? Dans une cave ? Dans un placard ?
Françoise Chandernagor évite la question, vous êtes dans une chambre !

Imaginez l’enfance d’un petit garçon dans cette chambre, dans ce lit, hors du temps, hors du monde, sans réconfort sans amour. Sans lumière, sans horloge, sans jeux, sans livres, sans camarade, sans… sans… sans rien d’autre que le temps qui passe.

Imaginez vous dans ce monde clos d’ombres, de recoins où se terrent les fantômes et monstres de votre enfance. Ceux-là même qui poussent des centaines d’enfants à demander à la tombée du jour que la lumière reste allumée.
Remarquez le problème est résolu ici, il fait sombre tout le temps.

Imaginez, que vous soyez un petit bout d’homme, pas bien haut, que l’on a toujours vêtu et dévêtu. Et que du jour au lendemain, vous vous retrouviez seul pour enfiler cette interminable chemise pleines de boutons. Que feriez-vous ? Sans doute comme lui, vous ne changeriez pas de vêtements…

Imaginez que les toilettes aient été condamnées que l’on vous ait confié un pot de chambre, mais que personne ne vienne jamais le vider. Imaginez, que feriez-vous ?

Imaginez cette enfance, cette enfance dont aucun enfant ne voudrait, d’ailleurs les adultes non plus ne voudraient pas de cette enfance. Pourtant ce sont des adultes qui ont donné cette enfance à l’enfant. Et rien ne le sortira de cette enfance, il n’y survivra pas.

Cette enfance n’est pas innocente, elle n’est pas naïve encore moins insouciante, un temps elle restera temps de découverte, mais un temps seulement. Car le temps érode tout même les tristes expériences de cette enfance.

Que diriez-vous aujourd’hui ? Que diriez vous si quelqu’un se contentait de vous dire imaginez ? Quel constat feriez-vous ? A n’en pas douter vous parleriez d’enfance maltraitée.
Mais voilà dans l’œuvre de Françoise Chandernagor nous ne sommes pas aujourd’hui, nous ne sommes pas à une époque où l’on imagine la vie de cet enfant. On ne parle pas encore d’enfance maltraitée et de toute façon cet enfant n’est pas un enfant normal. Cet enfant est déjà d’un autre temps, d’une autre époque, d’un autre monde, il n’a plus sa place.

Le livre de François Chandernagor est un ouvrage magnifique, dur, vous ne verrez jamais poindre un sourire à la commissure de vos lèvres. Ce livre ne prête pas à rire. Il vous emmènera dans un autre monde, un autre temps et peu à peu à une autre époque. Il tentera de vous dire le pourquoi du comment. Si vous faites un peu d’histoire vous n’aurez pas de mal, dès les premières allusions à déterminer qui est cet enfant. Et si vous ne trouvez pas vous vous laisserez guider par Françoise Chandernagor qui de pages en pages vous conte l’indicible, apporte à un fait historique son imagination fertile et en tournant l’ultime page…
Et vous aimerez regarder la petite histoire par le trou de la serrure de cette chambre, vous aimerez aussi sortir de cette chambre que l'auteur replace avec maestria dans la grande histoire... et cet enfant qui dérangeait, vous vous l'aimerez !  

Rédigé par Le blog de Gérard

Publié dans #Françoise Chandernagor

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